Quand une photo exposée dans la salle de formation du Centre International du Photojournalisme est venue m'accrocher le cœur.
En entrant dans la salle de formation du CIP, mon regard fut attiré par cette photo, une parmi d'autres, une parmi tout le tendresse et l'attention portée à un couple dont la femme est atteinte de la maladie d'Alzheimer.
En regardant cette dame, j'avais l'impression de plonger avec elle dans ce futur incertain, de regarder avec elle ce je ne sais quoi qu'elle fixait au-delà de la fenêtre. J'avais envie d'aller voir et en même temps, je n'aurais jamais osé entrer dans cet intime. Et ces mains qui en disent tant... Pourtant ce regard semblait intrigué mais pas inquiet comme un regard sur quelque chose de différent, de nouveau, un quelque chose qui l'attire et attire ses pensées qui s'échappent. Presque un espoir, là-bas, au-delà de notre vision, au-delà de nos yeux.
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Justement, un autre regard...
Changer le regard, précisément le sujet du projet.
Le regard est le reflet de l'âme et une âme abîmée, meurtrie ou blessée se souvient. La mémoire est un enjeu réel. On peut oublier, on ne peut pas, on veut ou on ne veut pas. On peut décider de laisser les blessures en arrière, on peut apprivoiser la mémoire ou négocier avec elle. On peut même pardonner en se souvenant. C'est entre soi et soi.
Puis un jour, c'est le corps qui peut ou qui veut oublier, un corps qui ne peut plus ouvrir les portes d'avant. Alors, sans souvenirs, la mémoire flanche, s'allège, comme une forme de dentelle dont on ne peut plus combler les vides. Et le regard doit se recréer car une fois la mémoire vide, il faut tout recréer, réinventer, ultime sursaut où les sens retricotent les accrocs de la vie.
C'est précisément en cela que cette photo me touche dans son intention car on comprend bien ce qui se passe. On ne voit pas non plus une autre phot, le regard de son mari, empli à la fois de tendresse et d’inquiétude mais aussi empreint de questions.
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Alors, quand l'objectif de l'appareil photo rencontre l'oeil et l'intention, la magie opère.
Le photographe encore plus le photojournaliste, peut mettre son empreinte sur la vie, sur tout ce que son regard touche et au final, sur lui-même, Permettre à ce nouveau regard d'éclore, forcément cela va changer aussi le regard des gens qui regarderont d'abord les photos et quand ils auront saisi l'émotion ou le message, vont se tourner vers celui qui a posé son intention, en conscience ou pas du reste, comme une caresse ou comme un coup de poing. Surprise et étonnement croisés, compréhension au-delà de paroles qui ne peuvent pas toujours exister mais qui se posent autrement.
Le projet IMAGES sera peut-être une manière de monter sur les tables, au même titre que dans le Cercle des Poètes disparus, au risque d'affronter, de s'affronter soi-même pour faire la plus belle des découvertes : soi-même. Ô capitaine, mon capitaine...
Inspirez-vous
Merci à Lionel pour la tendresse et l'acuité de son regard et pour ses photos sublimes.
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